Asinerie
H. Wang Keping
"Les Oiseaux"
Publié le 20/01/2020
Artiste chinois, autodidacte, Wang Keping, installé en France de longue date, a toujours utilisé des techniques traditionnelles pour ses sculptures en bois, noirci au feu, selon la tradition de son pays. Ce travail épouse et sublime les propriétés des bois que l’artiste sélectionne, dans une recherche esthétique et spirituelle inspirée de la philosophie taoïste, de la statuaire antique de la dynastie Han (206 av. J.-C. - 220 apr. J.-C.), mais également de l’art populaire des campagnes chinoises.
Ses œuvres aux formes rondes et généreuses sont polies, sombres, presque noires, avec une patine laissant délibérément apparaître les veinules, les craquelures du bois. Il préfère, en effet, respecter la forme initiale de son matériau.
L’artiste éprouve une passion pour ce qu’il appelle “la chair des forêts”. Il suit les courbes naturelles du bois pour faire naître des formes d’une grande sensualité. Avec leurs figures coupées à mi-corps, comme des troncs, ses sculptures semblent être enracinées en elles-mêmes. “Chaque morceau de bois me fait sentir quelque chose, m’inspire”, “je vois les formes dans le bois”, “les formes vivent dans l’imagination”, dit-il.
C’est en effet à partir des veines, des nœuds et des fentes, de la surface plus ou moins accidentée des morceaux de bois que l’artiste dégage les formes essentielles de ses sujets. Chaque tronçon est ainsi savamment choisi et respecté dans son intégrité.
Ce rapport primordial à la nature, source d’inspiration première et matrice formelle, se manifeste également dans les soins que Wang Keping apporte à la surface de ses œuvres. Plusieurs étapes contribuent en effet à leur donner cette peau lisse et douce, qui fait véritablement appel au toucher : les sculptures sont d’abord polies pour effacer les traces d’outils et ne laisser visible que le relief inhérent à la matière, puis brûlées au chalumeau avec un soin extrême, afin d’obtenir une teinte finale unique à chaque sculpture. Ce traitement accentue la dimension sensuelle véhiculée par les lignes suggestives et rondeurs généreuses des œuvres, dont l’harmonie générale est porteuse de toute leur vérité.
Les séries des Oiseaux ont été commencées par l’artiste à partir de 1982. Wang Keping n’a cessé de voir des oiseaux se former dans les branches mêmes des arbres. Ses créatures sont des abstractions qui lui permettent de révéler les détails du bois, qui à leur tour définissent les textures de la sculpture.
REPÈRES BIOGRAPHIQUES
Wang KEPING
CHINE
Wang Keping est né en Chine en 1949, année de création de la République Populaire de Chine. Autodidacte, il commence la sculpture sur bois en 1978 et devient un co-fondateur de l’un des premiers mouvements artistiques contemporains en Chine, le Groupe Les Étoiles. Ses travaux donnent voix à la révolte d’une Chine sur le point de se transformer, après la fin de la Révolution culturelle et la mort de Mao Zedong. La première exposition des Étoiles n’est pas officiellement autorisée : les artistes accrochent spontanément leurs travaux sur les grilles du Musée d’art national de Chine. Ils sont confisqués par la police deux jours plus tard. Les artistes organisent alors une marche de protestation, réclamant la liberté de créer. Un an plus tard, le même groupe d’artistes sera invité à exposer à l’intérieur du musée. Les œuvres de Wang Keping sont parmi les plus politiquement engagées au sein du groupe. Sa sculpture Silence montre un homme aveugle et sourd, comme une analogie des temps. Son œuvre Idole est peut-être la première à oser une parodie du Président Mao, représenté sous les traits de Bouddha. Avec Hang Rui et Ma Desheng, il est l’un des principaux leaders du Groupe Les Étoiles. Il s’exile en France en 1984 et détourne son travail du contexte politique pour se concentrer davantage sur la simplification de la sculpture, aussi bien figurative qu’abstraite. Inspiré par les lignes du moderniste Constantin Brancusi, l’élégance du Chinois Han et le côté brut de la sculpture africaine, Wang Keping a ouvert une voie unique et tout à fait personnelle dans la sculpture des quarante dernières années.
Wang Keping est représenté depuis 2017 à Paris et à Bruxelles par la Galerie Nathalie Obadia. Il est représenté à Hong-Kong par la 10 Chancery Lane Gallery depuis 2001. Il a collaboré avec la Galerie Zürcher (à Paris et New-York) de 1986 à 2016.