Près de Rome, la Villa d’Este abrite une fontaine représentant une exubérante Diane d’Ephèse, déesse de la fécondité, aux multiples mamelles. Directement inspiré de ces jeux d’eau, ce jardin comporte, en son centre, un mur en pisé, source de vie d’où s’écoule du lait de chaux dans un bassin. Habituellement utilisé comme antiseptique pour améliorer les sols, démousser la pelouse ou badigeonner le tronc des fruitiers, le lait de chaux se prête autant à la métaphore de la maternité qu’à celle d’une guérison. Le jardin nous exhorte à entretenir une relation toute aussi bienveillante et généreuse avec notre environnement. Ses contours évoquent le milieu humide de la forêt, les fruits de la cueillette et des arbres n’épuisant pas les sols. À la sortie, la forte présence du minéral sonne comme un avertissement. Si nous ne prenons pas soin de la nature, le végétal disparaîtra. Nous ne pouvons pas nous nourrir de la terre sans accepter de grandir et protéger le vivant à notre tour. Source et ressource sont ici en question : d’où venons-nous et quel avenir avons-nous le pouvoir de préparer ?
CONCEPTEURS
Bertrand DE LA VIEUVILLE et François PIEDNOIR, concepteurs paysagistes et Jean-Marie DESGROLARD, concepteur paysagiste et artiste plasticien
FRANCE
Bertrand de La Vieuville est paysagiste et se dédie principalement à la conception de jardins de toutes échelles. Issu d’une formation en agriculture et diplômé en biochimie il a complété son cursus du vivant en intégrant l’École Nationale Supérieure du Paysage de Versailles. Passionné par l’usage de l’espace, intimement lié au monde végétal et connecté à toutes les strates du paysage Bertrand de La Vieuville initie des jardins atypiques, pratiques et esthétiques. Il intègre l’Homme dans son environnement pour une cohabitation sensible et heureuse avec le végétal. Il aime apporter un confort abouti à l’usager pour le mener dans un environnement apaisant, serein au profit de l’observation, de la contemplation et de l’échange. Plus attaché à la notion de bon sens qu’à une écologie revendiquée il s’applique à intégrer le projet dans son contexte et à cultiver autant que possible les économies de moyens. Son regard artistique s’infiltre pourtant systématiquement dans le projet pour porter la force du jardin au-delà du temps présent et du visible. Il anime son atelier de création depuis 2008 tant au profit de la commande publique que privée. En 2019, il est élu président de l’Association des Concepteurs de Jardins. Il participe ainsi activement à la reconnaissance du métier, accompagne de nouveaux talents et fédère la force vive de la conception de jardins.
François Piednoir
“J’ai travaillé une dizaine d’années dans le domaine de la prise de son, pour le cinéma et le documentaire. J’y ai notamment appris la rigueur et le sens de la qualité. En collaborant à la réalisation de projets artistiques, j’ai affiné ma sensibilité et mon sens critique. Une écoute attentive des paysages sonores a développé mon intérêt pour le temps long, celui de la nature et du projet de paysage. Puis, j’ai eu envie de passer de spectateur à acteur, de retrouver quelque chose d’essentiel, un ancrage à la terre et au végétal, une réminiscence de mon enfance à la campagne. Une intuition m’a guidé vers le travail avec la matière vivante pour des êtres vivants. Créer des lieux pour éveiller, toucher, stimuler, faire rêver. J’ai suivi la formation de concepteur de jardins à l’École Nationale Supérieure de Paysage de Versailles. Là, j’ai acquis les savoir-faire et les outils intellectuels pour penser et concevoir un projet de jardin, tout en nourrissant mon désir d’apprendre. Je m’engage désormais sur le chemin de ceux qui transforment le monde autour d’eux. J’ai collaboré à la conception et/ou la réalisation de projets de jardins urbains ou évènementiels mais également à des projets privés de plus grande ampleur en territoire rural au sein de l’agence Daphné Charles - Paysages. Je suis également responsable du potager de l’Hôtel Le Barn (Parc de la Haute Vallée de Chevreuse) - 2500 m2 en éco-culture, que j’ai conçu et réalisé.”
Un parcours atypique, principalement nourri de nature et d’art, Jean Marie Desgrolard a toujours alterné les genres entre sculpture, peinture, installation et jardin. Il ne donne pas à sa vie professionnelle une importance prioritaire et aime dire que ce n’est pas le projet qui entre dans la profession, mais la profession qui entre dans le projet. Seules comptent à ses yeux la création et la curiosité dans ce qu’elles ont de perméable au présent et de discrétion avec le temps. Le jardin est pour lui, par nature le plus complet et le plus complexe des défis créatifs et donc, le plus riche pour faire avancer notre relation et notre compréhension du monde. De l’exploitant agricole qu’il était très tôt, en passant par les arts plastiques, jusqu’au jardin aujourd’hui, le fil conducteur est un attachement plus qu’un intérêt à ce qui ne se comprend pas de la nature et de notre relation mystérieuse avec elle. Diplômé de l’École Nationale Supérieure du Paysage de Versailles, la conception de jardin est pour lui une forme de synthèse, symbiose, entre un support temporel, un acteur et un lieu : terre, homme, espace n’ont pas fini pour lui d’inventer, de résoudre, de comprendre et de vivre et il tient à faire partie de ces interrogations-là.