Appartements princiers, Château
Hanns Zischler
"Nach der Natur"
Publié le 14/11/2018
Hanns Zischler est une personnalité hors normes dans la vie culturelle allemande et européenne. Éditeur, écrivain, acteur majeur -il a tourné dans plus de 170 films–, c’est aussi un remarquable photographe, particulièrement inspiré par le spectacle de la nature. Usant d’une technique de prise photographique ancienne, celle du sténopé, alliée aux techniques numériques les plus actuelles, Hanns Zischler explore toutes les virtualités poétiques de la lumière et fait surgir le tremblé, la vibration profonde d’un paysage, mêlant en une même image les sortilèges du visible et de l’invisible.
"Hanns Zischler, que la préhistoire et les commencements du photographique passionnent depuis longtemps, a adopté le sténopé et en a fait, via la couleur, l’instrument d’une exploration qui, d’une part, se condense sur cette simplicité magique et, d’autre part, exalte les particularités de ce type d’images. Ce dont il s’agit, à travers ces images, c’est de rendre pleinement manifeste l’action et le pouvoir de la lumière, l’apport de la couleur étant ici considérable : en effet, si d’un côté, les vues qui nous sont ainsi offertes sur le monde évoquent la possibilité d’une origine continuée –comme si le passé ou la mémoire du photographique remontaient naturellement en surface–, de l’autre, elles sont comme violemment baignées dans l’eau d’une modernité évidente. Entre cette mémoire en noir et blanc et cette révélation colorée, c’est toute l’histoire de la sensibilité photographique qui est pour ainsi dire dilatée.
La caractéristique la plus troublante des images obtenues par sténopé est immédiatement perceptible mais très difficile à définir. L’impression qu’elles donnent, bien plus que celle d’un flou, est celle d’un état transitoire et inachevé de l’image : on éprouve, devant elles, d’être devant des images qui continuent de naître, qui sont encore en train d’advenir. Comme si le « bougé » (bewegt) était intérieur à la lumière, et comme si la lumière s’étonnait devant nous de son propre dépôt. Avec la couleur, cet étonnement prend, dans les images de Hanns Zischler, l’allure d’une vivacité qui serait en même temps et déjà un départ : montée à son intensité la plus grande, la couleur est comme déjà en train de se réduire, de s’en aller". Jean-Christophe Bailly in Nach der Natur - camera obscura, Kehrer Verlag, 2013.
REPÈRES BIOGRAPHIQUES
Hanns ZISCHLER
ALLEMAGNE
Né à Nuremberg en 1947, Hanns Zischler est surtout connu comme acteur de cinéma. Il a notamment joué dans des films de Wim Wenders, Peter Handke, Jean-Luc Godard, Claude Chabrol, Liliana Cavani, Istvan Szabo, Steven Spielberg, et dans de nombreux films et séries TV.
Après des études de philosophie, ethnologie et littérature allemande à Munich et Berlin, il a travaillé comme dramaturge à la Schaubühne de Berlin entre 1972 et 1975. En 1986, il était le partenaire de Jeanne Moreau dans Le récit de la servante Zerline de Hermann Broch, mise en scène de Klaus Michael Grüber, au Théâtre des Bouffes du Nord.
Il est également traducteur (entre autres de Jacques Derrida), éditeur (Alpheus Verlag), essayiste et écrivain : Visas d’un jour (Christian Bourgois, 1994), Kafka va au cinéma, (Cahiers du Cinéma », 1996), I wouldn’t start from here : Verzettelte Geschichten (Marbacher-magazin, 2008). En 2013 paraît son livre-essai Berlin ist zu groß für Berlin (Berlin est trop grand pour Berlin) chez Galiani.
Son travail photographique commence en 1970. Depuis une quinzaine d’années, il se sert de préférence d’une caméra obscura (Rigby pinhole camera).