11. Apesanteur de la matière
Vanishing black hole
Stephen W. Hawkin définit le trou noir comme « une région de l’espace-temps d’où il n’est pas possible de s’échapper pour atteindre un observateur éloigné. Sa frontière s’appelle l’horizon et coïncide avec la trajectoire des rayons lumineux qui n’ont pu s’échapper ».
Si c’est un paysage en trou noir d’où rien ne pourrait s’échapper, ici, malgré tout, le trou noir éclate en multiples perspectives et fuit. L’espace s’échappe, et renvoie à chaque fois vers soi et au-delà.
Dans le trou noir, le passage de l’horizon est l’aspiration à la libération de la matière. Libération dans la matière.
Dématérialisation.
Immatérialité.
Mais densité maximum.
Apesanteur/pesanteur.
Lorsque l’espace fuit, le temps file et l’esprit est libéré.
Dans le trou noir seul l’esprit s’échappe.
Défi ultime du jardin, puisque qu’aucune plante n’est jamais totalement ni vraiment noire. Et pourtant, le noir peut être lumière, comme le dit Soulages, et Matisse a toujours affirmé que « le noir est une couleur ». Ce jardin-installation est un simulateur d’espace qui attire le visiteur dans une virtualité physique. Si dans une chorégraphie le corps danse pour décrire l’espace, ici, dans ce jardin l’espace danse pour le corps. Ce jardin-installation est simple. Il s’apparente au cabinet de curiosité, mais cette fois en extérieur. Qu’il pleuve, qu’il fasse gris ou beau, la pluie, les nuages comme le soleil, en se mirant dans les glaces et la pièce d’eau, vont renforcer les effets et les rendre dynamiques. Une limite de glaces noires métallisées, sans être tout à fait miroir redessine les limites du jardin en ovale. L’absence d’angles, les glaces non verticales, inclinées de manière non régulières, posées sur chevalet à l’arrière, reflètent et démultiplient, tout en les absorbant dans le noir, les réflexions avec distorsion. Un sol noir, fait de fins copeaux de pneus, absorbant sous les pieds, recouvre la surface doucement travaillée et creusée jusqu’à une partie centrale végétale plantée d’ophiopogons noirs. La limite des glaces fait chicane à l’entrée pour immerger le visiteur, seul ou en groupe, dans ce kaléidoscope noir.