Galerie du Fenil
Claude Lefèvre
"Fuzei"
Publié le 22/11/2018
Claude Lefèvre aura passé beaucoup de temps à réaliser de nombreux projets photographiques avant de découvrir le Japon. Ce sont les films d’Ozu, de Naruse, d’Uchida, de Kurozawa et de tant d’autres réalisateurs qui l’ont éveillé à la culture japonaise, au moment même où il commençait à appréhender la photographie, dans les années 1970. Dès lors, leurs influences sur son travail furent prépondérantes: rigueur des cadrages, lumière des intérieurs des maisons japonaises, esthétisme des compositions des plans et séquences, épure des décors. Claude Lefèvre doit à la culture japonaise, à son cinéma et sa photographie, en particulier, une exigence esthétique qui ne l’a jamais quitté, tout au long de ses travaux photographiques sur plus de 40 années. C’est encore ce qui l’habite dans ce travail, mis en œuvre depuis 4 ans sur les quelques 200 plus beaux jardins japonais, “lieux de beauté paysagère”, comme les désigne le Ministère de la culture du Japon. Ce travail est avant tout un travail d’artiste, artiste photographe, même si parfois sa démarche peut s’apparenter à un travail anthropologique sur l’histoire des jardins, ce qui pourrait être pour le photographe un travail futur. C’est donc une histoire de la beauté, une histoire de la beauté des jardins du Japon, beauté séculaire de l’art de mettre en espace la beauté du monde naturel, beauté des plus remarquables paysages japonais, voire de la Chine, où des paysages de la cosmogonie et des croyances, qu’elles soient shintoïstes ou bouddhistes, que tente de restituer cette exposition.
"Les films d’Ozu, de Naruse, d’Uchida, de Kurozawa et de tant d’autres réalisateurs m’ont éveillé à la culture japonaise, au moment même où je commençais à appréhender la photographie, dans les années 1970, dès lors leurs influences sur mon travail, furent prépondérantes, rigueur des cadrages, lumière des intérieurs, esthétisme des compositions des plans et séquences, épure des décors, oui je dois à la culture japonaise, à son cinéma et sa photographie en particulier, une exigence esthétique qui ne m’a jamais quitté tout au long de mes travaux photographiques sur plus de quarante années.
C’est encore ce qui m’habite dans ce travail, depuis quatre ans sur les quelques 200 plus beaux jardins japonais, "lieux de beautés paysagères" comme les désigne le ministère de la Culture du Japon.
La rencontre avec le Japon, sur le terrain, s’est faite longuement attendre, il m’aura fallu voyager beaucoup, réaliser des projets photographiques, qui me menèrent dans une errance d’humanité à la rencontre des peuples d’Afrique, Namibie , Afrique du sud, Mali, Ethiopie, Somalie, Maroc ; d’Amérique, Mexique, Guatemala, Honduras, Pérou, Panama, Chili, Bolivie, Patagonie, Amazonie ; d’Asie, Chine, Vietnam, le Cambodge, Thaïlande, Birmanie ; l’Indonésie, l’Inde et tant d’autres populations croisées dans ces confins du monde.
La rencontre avec les jardins du japon n’est au fond qu’une étape sur cette soif de découverte de l’ailleurs, curiosité insatiable, je ne voudrais pas crever avant …………….. disait Boris Vian.
Qu’est qui vous pousse à aller sans cesse au bout du monde, demandait un journaliste à un grand voyageur, il lui répondit, ce qui m’intéresse c’est ce qu’il y a derrière.
J’avais envie de savoir ce qu’il y avait derrière ce Japon de ma culture, méditer devant les mystères des jardins zen, je voulais rencontrer ce qu’il y avait derrière ces noms de ville qui me faisaient tant rêver, je voulais découvrir le Japon, celui niché derrière tout cela.
Ce qui m’a parlé très vite dans mes premières confrontations avec les jardins, c’est que j’y ai retrouvé immédiatement ce qui m’avait influencé dans mon travail photographique, dans la rencontre avec le cinéma et la photographie japonaise, j’étais dans la même sublimation de l’espace, la même rigueur esthétique, la même exigence où pierre, rocher, pont, île, lanterne, eau, montagnes s’harmonisent dans une telle perfection, que l’émotion s’invite bien souvent au voyage.
Ces éléments y sont si codés, si maitrisés et à la fois si légers, métaphores du monde si abouties, si denses de signification et si démunies de lourdeur, que l’enchantement est là.
C’est au travers d’une avancée, sorte de vérandas, que possèdent maisons et temples, que je découvrais le plus souvent les jardins, lieu idéal de la contemplation, voire de la méditation, union presque mystique des angles droits et des formes naturelles, c’est une vision complètement photographique de l’espace, le jardin s’offrant à la vue dans ce cadre rectangulaire, précurseur du cadre photographique.
C’est ainsi que j’ai eu mes premières émotions face à cette beauté, face à ce mystère, du pourquoi ça fonctionne, comment tout cet agencement où rien n’est posé au hasard, où intervient tout un art ancestral de dresser les pierres, où bien souvent l’orientation du jardin se plie aux exigences de la géomancie chinoise, où la main de l’homme est omni présente, impression de calme de sérénité, de beauté, de silence, d’immanence.
J’avais là à la fois mon sujet photographique qui devait passer par la nécessité de restituer au mieux cette beauté et puis plus ambitieux essayer de répondre à cette question du pourquoi cela fonctionne, je n’ai pas pour le moins réussi encore à y répondre, mais est-ce si important ?
L’essentiel étant que cela est.
Le ministère de la culture du japon a donc dressé une liste d’environ 200 jardins remarquables, se situant sur tout le territoire japonais, avec bien sûr une très forte concentration sur les régions de Nara, Kyoto, capitales historiques du Japon. J’ai donc utilisé avec bonheur cette liste comme un fil conducteur, même si je n’ai pas l’intention de faire un inventaire photographique de ces 200 jardins, d’autant que certains ne figurent sur cette liste que par un intérêt historique, ou d’ancienneté et n’ont aucun intérêt esthétique, que certains d’autres sont en restauration, et certains ne sont ouverts qu’une semaine par an.
Quelques jardins que j’ai découverts dans mes recherches, parfois exceptionnels, ne figurent pas sur cette liste.
Cette exposition est donc le résultat d’une errance photographique dans plus d’une centaine de jardins d’Hokkaido aux extrêmes iles tropicales d’Okinawa, en passant par la quasi-totalité des préfectures japonaises, d’Aomori à Kagoshima. Certains de ces jardins furent faciles à trouver, d’autres ont demandé de longues recherches dues à leur isolement et à leur peu de notoriété (ce qui n’a rien à voir bien sûr avec leur beauté, souvent exceptionnelle).
Ce travail est avant tout un travail d’artiste, artiste photographe, même si parfois ma démarche peut s’apparenter à un travail anthropologique sur l’histoire des jardins, ce qui pourrait être un travail futur.
C’est donc une histoire de la beauté, une histoire de la beauté des jardins du Japon, beauté séculaire de l’art de mettre en espace, souvent restreint, la beauté du monde naturel, la beauté des plus remarquables paysages du Japon, voire de la Chine, où des paysages de la cosmogonie tels qu’ils apparaissent dans les croyances, qu’elles soient shintoïstes ou bouddhistes.
C’est de cette beauté là que tente de restituer cette exposition." Claude Lefèvre
Repères biographiques
Claude LEFÈVRE
FRANCE
C’est en 1966 que l’aventure photographique de Claude Lefèvre débute quand il commence à travailler au journal France Soir. En 1972, a lieu sa première exposition au Musée des Arts Décoratifs. Dès lors, et avant même de découvrir le Japon, il mène une vie d’errance humanitaire à la rencontre des peuples d’Afrique (Mali, Ethiopie, Somalie, Maroc), d’Amérique (Mexique, Guatemala, Honduras, Pérou, Panama, Chili, Bolivie, Patagonie, Amérindiens d’Amazonie), d’Inde, d’Asie du sud-est (Chine, Vietnam, Cambodge, Indonésie) et de tant d’autres populations croisées dans ces confins du monde qui seront autant de sujets d’exposition pour le photographe.
Depuis 2009, Claude Lefèvre mène un travail passionné sur les 200 jardins classés "lieux de beauté paysagère" par le Ministère de la Culture du Japon.