Le duo d’artistes G&K, Katarzyna Kot et Stéphane Guiran, part à la rencontre des Grands Vivants (glaciers, forêts, fleuves…) pour créer des œuvres mêlant poésie et reconnexion, réparant notre lien à la nature, nous donnant l’envie d’être, d’une autre façon, humains sur Terre. Inspirés du Symbiocène de Glenn Albrecht, ils prônent une façon d’être guidée par le sens de nos actes et nourrie d’espérance, consciente de notre communauté de destin avec tous les vivants. « Retrouver l’émotion, l’émerveillement, le sentiment de symbiose avec la nature est ce qui nous lave intérieurement, ce qui nous répare en profondeur. C’est le socle de toute transformation sociétale vers un monde respectant le vivant et la clé contre notre sentiment d’impuissance face au changement climatique. En ressentant au plus profond de chacun de nous notre lien intime à la Terre, il devient naturel de repenser nos choix, d’accepter de nous transformer en privilégiant les comportements qui font sens », expliquent-ils.
En 2024, les artistes ont passé deux mois en résidence dans l’extraordinaire forêt primaire de Bialowieza en Pologne, la dernière d’Europe. Cette Puszcza Bialowieska se régénère seule depuis 12 000 ans, grâce à un écosystème millénaire et une biodiversité exceptionnelle. Abritant des femmes et des hommes depuis la fin de l’ère glaciaire, elle reste un des rares témoins en Europe d’une entente durable et respectueuse entre les humains et le reste du vivant.
Lieu de transformation et de guérison, la Puszcza s’est révélée aux artistes à travers les rencontres avec des habitants inspirants, des scientifiques passionnés, et la tradition des Szeptuchy, guérisseuses que les artistes ont nommées « femmes-murmures ». Le duo a été témoin de la transformation des habitants par les sujets existentiels : à travers leurs récits, ils ont été confrontés aux blessures qu’a connu la Puszcza avec les coupes d’arbres jusqu’en 2017, et à la crise actuelle des migrants arrivant par la partie biélorusse de la forêt. Les propos recueillis montrent à quel point cet Être-lieu pousse chacun à s’interroger sur le sens de ses actes, à prendre conscience que tous les vivants de cette planète forment une communauté de destin, ce que Achille Mbembe appelle une « communauté terrestre ».
À la lumière de cette expérience, les artistes ont conçu une série d’œuvres. Tout d’abord, un film documentaire retraçant leurs rencontres et les gestes poétiques qui les ont reliés à la Puszcza. Ensuite, une installation immersive interactive, qui permet de partager le moment le plus émouvant de leur résidence : un rituel de reconnexion à la forêt, dans une œuvre de land art, mise en résonnance par le vibraphoniste Pascal Schumacher et la voix de la chanteuse Karolina Cicha. La dimension interactive, réalisée en collaboration avec Lilian Guiran et le studio Isotone de Montréal, permet à chacun d’entrer en connexion avec cette forêt, de la ressentir, en vivant une expérience de réalité multiple, sensorielle, synesthésique et poétique avec ce que les artistes considèrent comme un Être-lieu doté d’une conscience, d’une capacité à interagir avec nous. Enfin une série de dessins et photographies inspirés par leurs échanges avec la Puszcza, par les rencontres et les témoignages recueillis.
REPÈRES BIOGRAPHIQUES
G&K (Stéphane GUIRAN et Katarzyna KOT)
FRANCE

Le duo G&K (Stéphane Guiran et Katarzyna Kot) est né au Domaine de Chaumont-sur-Loire, dans le cadre de la Saison d’art 2022.
De cette rencontre a germé la volonté de s’engager sur une voie de création commune, en méditant avec la Terre et en proposant un autre regard sur les défis posés par les changements climatiques. Les deux artistes envisagent demain comme un nouveau chapitre qui s’ouvre, nous invitant à imaginer d’autres façons d’être au monde, plus harmonieuses, en résonance avec le concept de symbiocène de Glenn Albrecht.
« Nous partons à la rencontre de ce que nous appelons des Grands Vivants, c’est-à-dire de grands espaces naturels sensibles, à la fois merveilleux et fragiles, comme les glaciers, les forêts primaires, les fleuves... Nous écoutons leur mémoire millénaire, interrogeons notre place dans une communauté de destin avec tous les autres vivants de notre planète, pour repenser demain, réparer notre lien au vivant et retrouver du sens. »
Après une première série d’œuvres inspirées du glacier Vatnajökull en Islande (La nuit est une page blanche, 2023), le duo s’est immergé à l’automne 2024 dans la dernière forêt primaire européenne, la forêt de Bialowieza en Pologne. De cette expérience sont nés un documentaire, des dessins et photographies, et une installation proposant au public de revivre un rituel musical créée dans une œuvre de land art, au cœur de la forêt. La dimension interactive, réalisée en collaboration avec Lilian Guiran et le studio Isotone de Montréal, permet au public de vivre un moment synesthésique et poétique de reconnexion à la nature.
En 2023, le duo a créé l’association Grands Vivants, pour contribuer à agir en faveur des Êtres-lieux qu’ils partent rencontrer. Avec le soutien de la Fondation Lemarchand et la collaboration du laboratoire Spygen, dirigé par le scientifique Benjamin Allegrini, leur création dans la forêt de Bialowieza a permis de réaliser la première cartographie du vivant par ADN environnemental d’une forêt primaire européenne.
Née en 1978 en Pologne et installée depuis plus de vingt ans à Luxembourg, Katarzyna Kot a grandi en gardant un lien très intime avec la forêt, qui inspire et habite profondément ses créations. Ses installations, tissées de végétaux cueillis dans les bois, ouvrent un espace entre sa démarche de sculptrice et sa vision élargie du vivant. Empreints d’un lien profond avec la Terre, ses Mandalas ou ses Roues de l’Existence sont autant de méditations faites avec le vivant, dans une reconnexion avec un Tout qui nous invite à retrouver notre centre.
Œuvres présentées au Domaine de Chaumont-sur-Loire : Les Roues de l’existence (Unité I, Migration, Mouvement perpétuel), 2022.
Né en 1968 en France, Stéphane Guiran vit et travaille entre Barjac et le Luxembourg. Formé à l’ESSEC en 1991, il change de vie en 2001 et se consacre depuis lors à la sculpture. Ses installations oniriques proposent un univers sensible où les pierres, les cristaux comme tous les matériaux issus de la nature prennent vie et participent avec le public à une chorégraphie qui suscite des émotions profondes. Ces créations sont à la fois plastiques, audiovisuelles, sonores, et littéraires. Elles se construisent comme des narrations, offrent un voyage intime qui invite à une reconnexion à soi, notamment par la place redonnée au rêve et à la poésie.
Œuvres présentées au Domaine de Chaumont-sur-Loire : Le nid des murmures (2017, Manège des Écuries, œuvre pérenne), Le chant des ormes (saison d’art 2022), Le rêve des neiges éternelles (2022, Hôtel Le Bois des chambres, œuvre pérenne).
Le duo G&K est représenté par la Galerie Pierre-Alain Challier, Paris.